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Avec ce fascicule, nous allons découvrir la situation des artisans et des boutiquiers urbains et ruraux, de chaque profession, sur l’échelle sociale. Nous allons voir comment, sur plusieurs générations, les familles d’artisans et de boutiquiers pouvaient s’extraire de leur condition, s’élever socialement ou parfois régresser.
À la ville ou à la campagne, les artisans se répartissent en une multitude de petits métiers qui se différencient entre eux non seulement par la nature de leur travail, leur savoir-faire, leur technicité, mais aussi par leurs revenus et le niveau de leurs fortunes. Ainsi, s’il y a beaucoup d’artisans pauvres, il y en a aussi de plus aisés et de mieux considérés comme les « maîtres » des métiers devenus de véritables chefs d’entreprise à la tête d’un atelier ou d’une boutique.
Cette grande diversité du milieu artisanal est une source inépuisable d’étonnement d’autant que les distinctions entre, d’une part, paysan et artisan et, d’autre part, ouvrier et artisan ne sont pas toujours aussi nettes que de nos jours.
D’ailleurs, dans les villages, la grande majorité des artisans reste attachée à leurs origines paysannes. Ainsi, ils cultivent presque tous un lopin de terre, vivent au milieu des paysans, travaillent pour eux et partagent leurs espérances et leurs peines. Souvent aussi, ils épousent une fille ou une veuve de laboureur ou de journalier.
Par contre, dans les villes, la mise en apprentissage, le compagnonnage et l’embauche à la fabrique ou à l’usine détachent progressivement les artisans de leurs liens ancestraux avec le monde rural. C’est autant d’occasions pour eux d’ouverture sur l’extérieur, sur des espaces commerciaux plus larges, hors du village, de la ville et parfois même du royaume.
De plus, par leur position intermédiaire dans la hiérarchie sociale, entre les paysans et les bourgeois, les artisans contribuent largement à l’amélioration et la transformation de l’habitat, du mobilier et de l’outillage. Ce sont des acteurs pleinement impliqués dans le progrès social et matériel des XVIIIe et XIXe siècles.
À noter que, comme les frontières entre artisanat et industrie sont floues, j’ai choisi, dans ce Théma, de n’aborder que très peu les artisans salariés des villes et des campagnes, notamment ceux travaillant dans le textile. Une plus large place leur sera consacrée dans un prochain Théma dont le sujet sera Les ouvriers et les mineurs de l’industrie.
Enfin, les artisans migrants saisonniers (maçons, chaudronniers, ferblantiers, charpentiers…) ayant déjà fait l’objet d’une étude dans le Théma 6 intitulé Les migrations de nos ancêtres 1814-1914, ils seront seulement évoqués dans ce Théma. De même, le statut des épouses et des filles d’artisans qui travaillent avec leur mari ou leur père à l’atelier ou à la boutique, ayant déjà été étudié dans le Théma 14 (Les femmes actrices majeures de nos généalogies), il ne le sera pas ici.
Thierry Sabot est passionné d’histoire, notamment d’histoire locale, et d’archéologie. Il est titulaire d’une licence d’histoire et auteur de diverses publications. Il pratique la généalogie depuis plus de vingt ans avec le souci de recueillir la parole des « anciens » et de faire revivre les ancêtres dans le contexte de leur vie quotidienne, et non de remplir seulement les cases d’un bel arbre généalogique...